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La diagonale des fous

  • christophealexisbi
  • 11 avr.
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 2 jours


Un fou au service de la reine, mettant fin aux absurdes pouvoirs définnissant nos parties d'échecs - La diagonale des fous

Dialogue entre deux fous de la reine, deux agents non secrets se dé/plaçant nus sur l'échiquier du pouvoir, en diagonale et d'un nombre de cases non limité... Dans une partie orthonormée par la perpendicularité que le pouvoir et la re/nommée opposent à la vérité et au bonheur de participer au jeu de la vie.


Un fou cohérent s’adresse à un autre fou :


L’art, dans sa manifestation et sa représentation, nous précède. La raison humaine le re/cherche désespérément, ne faisant que l’effleurer parfois, le violer souvent, sans pour autant l’avoir atteint.  

L’art libre, autrement dit libéré de toute contrainte sociale ou intellectuelle imposée par l’autorité humaine, est l’inspiration et le souffle qui peut transcender le caractère fascisant du pouvoir que nous avons tiré du langage, par l’illusoire liberté de l’expérience et les excuses de l’empirisme.

Ne pouvant être à la fois le jeu et dans le jeu de façon entière et simultanée, rien ne peut être absolument libre, ni dieu(x), ni matière, ni vivant, pas même l’absence qui doit composer avec la présence. En l’Homme l’art, l’arbitrage et la liberté elle-même, ne peuvent donc que se rapprocher au mieux d’un idéal qu’il ne serait pas souhaitable d’atteindre. La recherche de l’instantanéité, de l’éternité, de l’unicité ou de la  dualité, dans leur impossible valeur absolue, ne fait que néant. Et dans le néant, ni vie ni mort n’ont le moindre sens. Or le non-sens, doit lui aussi composer avec son inverse.


Rien d’étonnant à ce que nous soyons les fous de cet échiquier de gagnants et de perdants qui se prennent au sérieux en refusant d’admettre qu’ils sont les mêmes dupes.


Non déconstruit, c’est-à-dire révélé dans sa nature et sa structure en révolution permanente, et agissant pour le compte de l’orgueil humain sans que ce dernier n’en ait conscience, invisible donc, le pouvoir du langage est fasciste de par sa propre nature « autodéterminée ». Il prend ainsi de multiples formes que nul n’est plus censé ignorer et que tous ne font qu’ OBSERVER (dans les deux sens du terme) : les langages du pouvoir. Dans ses architectures physiques (édifices), audiovisuelles et financières, toutes gouvernées par la puissance des nombres, le langage du pouvoir est l’image qui possède la bête humaine que nous sommes.


L’autre fou répond :


Ces mots résonne fort, et, malgré le temps qui s'échappe et m'échappe dans cette partie compétitive de gens raisonnables, je ne peux rester silencieux. Ce que tu évoques touche à ce qui me nourrit depuis toujours et me permet de vivre – au sens propre autant qu’au sens figuré. C’est ce qui me questionne jour après jour, depuis maintenant des décennies.


L’art, dans son essence, me semble être cette idée pure, cette forme d’intuition fondamentale que l’on tente d’approcher sans jamais véritablement l’atteindre. Une discipline vaine si l’on cherche à saisir, mais sublime dans son impossibilité même. Comme si l’art était déjà là, préexistant à l’humain, transcendantal, dans une réalité silencieuse qui attend simplement d’être vue, ressentie, expérimentée. Il ne s’agit plus de créer, mais peut-être d’écouter, de révéler ce qui était là bien avant nous. J’y vois une analogie frappante avec la physique quantique : tout serait déjà présent, sous forme de potentialités infinies, attendant qu’un regard, qu’une intention vienne les faire exister. Imaginer, souhaiter puis incarner… et soudain, le possible s’effondre en réel.


Ce mouvement émerveille autant qu’il nous trouble. Ce mystère, à la fois si vaste et si intime, bouleverse toutes nos tentatives de maîtrise.


Et le langage, lui non plus, ne semble pas échapper à cette logique. Au contraire, il semble émerger d’une couche tout aussi profonde du réel. Il n’est peut-être pas seulement un outil ou une construction, mais une émanation d’un ordre plus ancien, plus secret. Il devient alors puissance : celle de faire exister, de relier, de transformer… au point qu’on ne distingue plus clairement la cause de l’effet, l’origine de la conséquence. Le langage façonne autant qu’il reflète. Et tout pouvoir de cette nature appelle naturellement le désir, l’appropriation, en bien comme en mal.


Mais pourquoi ? Pourquoi ce pouvoir ? Pourquoi les arts ont-ils été révélés à l’humain ? S’il est vrai que la quête de perfection semble inatteignable, n’est-ce pas parce qu’elle n’a jamais été le but ? Et si l’art était, au fond, un moyen d’apprendre à regarder, à comprendre, à habiter le monde autrement, plutôt qu’un véhicule vers un absolu divin ?


Ou peut-être, au fond, que tout cela n’est qu’un rêve de conscience; illusion infinie, jeu de miroirs sans fin, sans vérité unique à atteindre. Et pourtant, quel vertige magnifique que d’y consacrer sa vie.


Le premier fou rebondit :


Je ne sais comment le dire, un merci suffira, ému, à fleur de peau, petit mot brillant, comme une larme.


J’essaie de retrouver le fil de mes pensées… Pas une « mince » affaire après cette vague dont ta réponse m’a envahi. Il y a de cela plusieurs années j’ai été chaviré puis remis à l’endroit par une étrange et belle idée, un sentiment qui ne contredisait pas la raison, de ceux qui provoquent ces larmes chargées de ces infinis que sont amour et tristesse. Amour pour la vision en elle-même offrant enfin un nid douillet pour « raison et sentiments » mutilés par leurs mariages et divorces d’intérêt - et tristesse pour tout ce qui a été sacrifié et l’est encore, sur l’autel de notre folie orgueilleuse. Sacrifié dans la laideur et la souffrance, dans le BUT invasif de saisir, de prendre, de s’accaparer, ce qui au fond nous est donné. Cette idée est peu dicible, mais je vois qu’elle est tienne aussi et je ne peux que m’en réjouir.


Pour la schématiser, il suffit d’évoquer un principe qui a inspiré l’esprit humain durant deux millénaires, avant d’être oublié par les uns et galvaudé par les autres : un triangle composé de trois points n’étant que la matérialisation de la simple log/ique qui se soustrait de l’impossibilité :

Pas de tout sans rien, pas de quelque chose sans autre chose, pas d’affirmation sans négation, pas de manifestation propre sans son inverse et son opposé, pas de pouvoir sans son ironie… Rien d’unique ne saurait avoir de sens et donc être, seul et de manière absolue. Ce qui nous mène à la complémentarité de l’unité, de la dualité et de la relativité, au nom desquels nous avons fait couler tant de sang et de larmes arrachées. Du point de vue de la forme, cela commence par le point, point dit micro (vers l’infiniment petit) qui ne serait pas sans son immanente projection : la sphère dite macro (vers l’infiniment grand)… Point qui est donc naturellement, intimement lié à l’idée de rayon et de segment, point affirmé qui pour la logique évoquée ici a nécessairement son opposé. En géométrie il s’agit des deux bornes du segment, en sémantique il s’agit de l’affirmation et de son ironie ou de sa négation, en physique on parle de forces opposées, indissociables et complémentaires. Or deux points formant un segment après séparation dans le domaine du manifeste (création d’un univers matériel composé de formes distinctes et qui a engendré « techniquement » son observateur vivant)  ont nécessairement un milieu.


Nous voilà donc devant un angle plat qui est aussi notre triangle ! Un triangle libre de tous ces conflits que le jeune observateur, ivre de pouvoir, motive autour des complexes d’unité, de dualité et de relativité. Et pour en revenir à mes précédents propos, un triangle dont l’inspiration et le souffle ont bouleversé toute la raison de l’Empire romain lors de sa conversion au monothéisme (naissance du zéro sémantique ou Dieu unique, inatteignable, non figurable et qu’il ne convient pas de nommer ou de personnifier). Ce zéro qui réunit les trois points en un, au-delà des capacités de l’observateur pouvant ainsi profiter de son incomplétude pour jouir du spectacle et de la beauté du monde. Observateur bien malheureusement sophistiqué, civilisé, usé par le devoir de l’être qu’implique la possession de l’avoir… Observateur contrarié par la pérennité de ses pouvoirs et complexé par l’inaccessibilité de l’infinité qui ne lui permet pas de compenser le poids inéluctable de sa finitude. Un mal profond, enraciné sous le poids de l’expérience empirique et qui caractérise la crise d’adolescence d’une humanité victime de ses propres pouvoirs. 


Ce triangle soustrait de zéro (comme le sont les nombres et les chiffres qui offrent la rationalité au caractère indénombrable et donc irrationnel de ces derniers) fut baptisé principe de la Sainte-Trinité et devint malheureusement un objet faisant force de loi sous l’Empereur Constantin. Une loi bien légitime, mais qui en tant que dogme motiva maintes persécutions entre hérétiques et non hérétiques. Le principe  évoque le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Une notion qui ne fait plus sens de nos jours… Néanmoins, libéré du dogme et d’une lecture imposée au premier degré par l’autorité sachante aux « pauvres pécheurs » que nous sommes (le peuple), il signifie ce qui crée (zéro dont tout est soustrait), ce qui est créé et engendrera l’observateur intelligent (le fils) et le langage (qui relie créateur, création et créature, nécessairement distinctes par séparation manifeste, disons matérielle, mais pourtant inséparables et ne faisant qu’un en zéro). Ce concept représente les prémisses de la notion d’immanence, bien malheureusement galvaudée par le dogme de la transcendance imposé par les autorités religieuses pour faire office de loi face à la légèreté conflictuelle de l’engeance humaine en société. En outre, le principe était aussi une première vision de ce que la physique quantique nous apprend de nos jours : « le tout » en tant qu’ensemble unique est aussi « tout » en tant que sous-ensembles composés de particules élémentaires et de « vide non vide » … Le séparable est inséparable - le fini est infini … Et chaque chose est de double nature et plus si affinité. Ce qui explique une énigme qui a fait couler beaucoup de sang et d’encre à propos de la double nature d’un certain Jésus (l’idéale représentation du fils) : à la fois humain et divin. Non 50% humain et 50% divin, mais 100% humain et 100% divin.


Et voilà bien qui devient indicible ! Parce que simple et beau, comme peut l’être la particule et ce qui nous ai donné à voir par le jeu de la brillance dans les ténèbres, mais aussi (à la fois) complexe et hermétique aux yeux du plus grand nombre. Nombre contraint par les obligations de résultat (ordinaires et fascistes), contraint par l’amenuisement du temps que les pouvoirs omniprésents lui dérobent. Dans le Nouvelle Ordre Mondial du Grand Marché de l’action, plus le temps de lire si ce n’est pour le loisir, plus le temps de réfléchir, plus le temps de faire abstraction… Agis ! « L’art, la philosophie, la métaphysique ne sont pas des métiers et gare à toi si tu oses tenter de libérer le nombre en attirant l’attention de la foule sur cet anneau unique dont l’instrumentalisation politique engendre les multiples pouvoirs (pourtant usurpés) qui la gouverne : le logos et son instrumentalisation en tant qu’objet ultime de toute puissance. »


Ce qui est simple, logique, manifeste, beau et généreux ici, c’est qu’un univers se soit créé composant avec une nature à la fois inerte et vivante, jusqu’à engendrer son propre observateur par le développement de l’œil, du nez, de la bouche, des oreilles (…) de l’animal et de sa forme de spéciation humaine. Et tout cela est d’autant plus simple et complexe, logique et imaginaire, manifeste et abstrait, beau et laid, généreux et égocentrique, que tout s’est accompli sans la moindre intention particulière… De l’art, pour citer ce mot qui nous est cher mon bel ami.


Il serait temps de réconcilier enfin deux partis-pris majoritaires fratricides :


Le parti-pris qui s’accroche à l’intention et au plan déterminé divin, un dogme motivant ainsi sa propre ironie parmi les affranchis et les incroyants : « Si les grenouilles de bénitier avaient raison, l’intention est cruelle et Dieu est un salaud. »

Et le parti-pris qui en l’absence de toute intention d’un monde purement matériel et accidentel, affirme que l’Homme doit lui-même donner sens à ce qui n’en a pas, profiter de ses pouvoirs tant qu’il le peut, ainsi que des droits et des jouissances que lui offre la société et sa main invisible toute puissante : Le Grand Marché de l’action et cette économie (pourtant arbitraire) que l’on imagine gouverner les nombres. 

     

Sans juste milieu, ces partis-pris en échec dialectique engendrent mutuellement les extrémismes multiples dont les pouvoirs instrumentalisent, violent et détruisent la création, les créatures, ainsi que l’art du langage et les langages de l’art.


J’espère avoir répondu au mieux aux quelques questions que tu as soulevées volontairement je pense, dans l’espoir de provoquer dans cette partie de dupes, un dialogue didactique et instructif.


Merci pour ton humble, petite et gigantesque contribution à notre quête de déconstruction et de réparation.

Un espoir de fous ! Une vision pourtant cohérente, rationnelle, un cri poussé dans l’obscurantisme d’un monde d’aveugles où les borgnes sont rois disent les philosophes.


CAB et Steph "Differently" - La diagonale des fous

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