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QUI SUIS-JE

Un parcours d'auteur, à cour et à jardin :

Objecteur de conscience depuis les couches culottes, j'ai vécu l'enfer de tous ceux et celles qui n'ont jamais pu remplir les petites cases par lesquelles nous devons nous définir pour obtenir la reconnaissance de notre existence par la grande et suprême autorité régnant sur le droit et le devoir. N'entrant résolument dans aucun moule, j'ai consenti depuis plus de vingt ans à une odyssée hors du commun, un voyage "gravitationnel" à double sens qui m'a conduit dans l'envers de nos décors, au cœur des mécanismes d'Histoire et de leur secret d'"architexture". Une odyssée durant laquelle le marin, pris par la mer, doit affronter les forces titanesques autant que les indicibles faiblesses qui soumettent l'Homme rattaché au port de la réalité ; et cela, jusqu'à ce que ces dernières lui ouvrent les valeurs sémantiques, arithmétiques, géométriques et musicologiques qui les composent. Une expérience m'ayant fait prendre conscience de la nécessité de déconstruire nos mythes et les langues véhiculaires qui leur donnent vie, déconstruire pour réparer l'Homme et sa machine. Réparer le créateur "l'apprenti-sorcier" autant que son système d'exploitation en révolution permanente, dont la détermination propre lui fera payer ses abus de pouvoir et ses vices de programmation.

Handicapé depuis de nombreuses années par le caractère chronophage d'emplois alimentaires sans rapport avec ma vocation, j'ai décidé de sauver mon activité en misant d'une part sur la publication de mes recherches sous la forme d'essais à caractère philosophique et d'autre part sur la professionnalisation du travail accompli dans une optique de diffusion de contenus : un blog amateur et un groupe de discussion sur Facebook, auxquels s'ajoutent dorénavant ce site, une nouvelle peau pour mon "bon vieux" blog et une boutique en ligne de "prêt-à-porter qui donne matière à penser".

Un certain Peter P... me murmure "Te voici face à l'obligation de passage à l'âge adulte, disons le domaine des pros, les con/vaincus aux mains expertes et aux corps confortablement rompus." ... Ceux qui DEVIENNENT à la fois quelqu'un et quelque chose, appartenant tous à l'entité sociale au sein de laquelle l'Être et son verbe n'ont jamais pu se définir d'un commun accord.  

Ce passage délicat et l'état d'urgence personnel ne sont néanmoins pas les seuls moteurs de mon entreprise : la finalisation de deux ouvrages est venue appuyer ma décision à un moment très opportun de la tempête qui agite masses et médias dans un climat de guerre totale larvée. Car après avoir eu mauvaise presse dans l'hypocrisie du contrat social (néolibéral) signé sur les décombres du second conflit mondial, la déconstruction du langage et des langues véhiculaires est enfin reconnue par les meilleurs prospectivistes.

Officiellement déclarée comme un art que l'on aurait redécouvert dans les fouilles archéologiques de notre Caverne, ce qui fut le "Grand œuvre" des alchimistes, des arithmomanciens et des philologues auxquels nous devons nos langues et littératures modernes, n'est plus un "secret d'architecte" et se trouve de nouveau au cœur des décisions humaines devant répondre aux enjeux de notre temps. Un sujet ardent, qui ré/unit et inter/roge nos Sachants autour de la table ronde où se discutent les intérêts des forces politiques, militaires, industrielles, scientifiques, religieuses et artistiques. Des forces que l'exercice du pouvoir de contrôler le nombre, mène inéluctablement à l'ironie de la "toute puissance". La guerre par exemple, lorsqu'elle est avec souffrance et haine, l'inéluctable héritage légué par les abus des marchands de paix, de vérité, d'amour et de bonheur. Le nombre, c'est la force ouvrière privée de son libre arbitre depuis une poignée de millénaires et cultivée en masse de façon intensive depuis deux ridicules siècles, avec rappel quotidien de la signature de son consentement à la servitude.

Voilà pour les grandes lignes du substrat, disons du parcours existentiel, et du projet qui s'y est développé.

J'avoue être aussi maladroit pour éditer un CV que pour porter une cravate en plein cagnard, j'ai été baby-sitter, jardinier et elfe de maison, agent agricole, déménageur, agent d'entretien, précepteur pour enfants de "bonne famille", adjoint chef de projet dans l'évenementiel... Et nouvellement chômeur technique, débauché par la crise multiforme et fraichement éxilé loin de tout, là où le béton n'a pas sa place. Mon véritable travail, c'est ce sacerdoce que j'assume depuis plus dix ans, ce sacerdoce qui a néanmoins scellé pour le meilleur, un accord entre l'âge de raison et l'enfant que je suis encore.Viellissant et embrassant le déclin, ma cape d'invisibilité n'a plus grande utilité, je remercie la vie, et donc la mort, de me l'avoir prêtée.

Il est temps de transmettre.

Et pour épanouir et récolter quelques fruits de mon travail, il est temps de le faire connaître.

Je vous laisse découvrir ci-dessous une lettre rédigée à l'attention de la maison d'édition Fayard, qui semble apprécier mes contenus et mon projet en tant qu'auteur. La lettre sera bien plus expressive qu'un CV.

CAB

Mon premier courrier à l'attention de Fayard :

Bien que sa rédaction soit assez récente, cet essai est le fruit d'un naufrage de jeunesse au beau milieu d'un port de plaisance et de l'odyssée qui s'en est suivie. Encore gamin je me suis mis dans la tête que les mécanismes d'une Histoire aussi banalement sordide que la nôtre, ne pouvait être le fait du jugement d'un Dieu Tout Puissant et qu'il était insultant de réduire les lois de l'univers  au statut de cause de ce désastre considéré comme inéluctable. C'était fait, le navire qu'on m'avait assigné était sabordé. Sans le savoir, je partais sur la piste de ces phénomènes tabous que sont les paralogismes naturalistes, la causalité et le libre arbitre. Sous la houle provoquée par le sillage des flottes en exercice, le frêle rafiot a vite coulé. J'ai donc appris à nager et au fil des années à me construire une embarcation suffisamment solide pour lever l'encre, prendre la mer et tenir un carnet de voyage. Fusse-t-il issu d'une famille modeste, les premières aventures d'un jeune homme européen sortant des sentiers battus pour découvrir le monde, sont fréquemment comparables à un itinéraire d'enfant gâté. Les voyages, l'humanitaire, les stages à la ferme, le partage... J'ai manqué peu de rendez-vous et n'ai échappé à la règle des stéréotypes que dans l'abîme des bas-fonds. L'appel de la rue, le bar qui cogne, le trottoir qui tue et les mains tendues de tous les "syndicats" du crime, avec en périphérie celles plus chaleureuses des racoleurs politiques de la révolution permanente. Fort heureusement aucune de ces maisons racoleuses, aucun de ces partis-pris n'a su répondre à mes questions, ni me détourner de ces forces qui grondent et murmurent au-delà de la réalité carcérale incarnée par l'ensemble de nos architectures sociales. On devient marin lorsque le fil d'Ariane est rompu et que l'illusion carcérale du paradis social s'estompe... Lorsqu'on a franchi le point au-delà duquel il est impossible de revenir au pain et aux jeux qui y sont servis.  Sans gloire le pèlerin devient capitaine de son âme, au fur et à mesure que la certitude d'un voyage retour s'amenuise.

Sans étonnement les étapes de ma quête m'ont imposé une réflexion épistémologique concernant la notion globale de progrès et la valeur positive que l'Homme lui attribue arbitrairement. Lorsqu'il prend le large, le voyageur aguerri s'éloigne de la foule et des opinions pour affronter les forces qui n'ont pas attendu le pouvoir de l'Homme pour faire et défaire le monde. Des forces qui nous feront payer très cher le prix de notre croissance et de notre confort illusoire. Sur les flots sans âme qui vive, il rencontre néanmoins les armées qui solderont par la guerre le fruit d'une paix mal acquise. La sainte croissance des moyens est le revers du domaine de la lutte, en d'autres termes le domaine de la dialectique corrompue par les intérêts particuliers et le machiavélisme rhétorique auquel la sérendipité du progrès confère les moyens de trahir la vérité. Un domaine où les alter-egos, les familles, les maisons, les royaumes, les nations et les empires ne partagent plus leurs savoirs que pour s'exploiter les uns les autres. Terre, mer, air, la "solution" territoriale n'est peuplée que de monstres titanesques et  impuissants protégeant la sombre boîte qui semble leur trésor. Arraché à ces eaux troubles, j'ai échoué sur une étrange île composée de formes, de chiffres et de lettres murmurantes cherchant à s'exprimer en tant que caractères. C'est sur cette île que le projet Homo-falsus a pris corps. Comment déconstruire nos paradigmes sans déconstruire le langage sous toutes ses formes ? Avant de reprendre la mer, l'île devait être explorée de fond en comble. 

De cette expérience, j'ai retenu une chose : lorsqu'un humble voyageur en quête rencontre les chimères que nous bâtissons, il fait face à des entités incarnées par les applications des paradigmes prêts à consommer qui structurent nos pensées. Des armes, des armures et des boucliers qui prennent vie, au prix que l'on connait. "Des éléments, des principes et des forces propres au langage que l'Homme croyait maîtriser, et autant d'entités sociales dont il profite aveuglément sans les connaître. Au prix d'un pénibilité infinie et d'un châtiment par le sucre qu'il procure. Et le pouvoir global, absolu, omniprésent que nourrit notre servitude, l'Homme commun l'admire sur un écran, en tuant le temps après une journée de labeur.

Plus d'arme, plus d'armure, plus de bouclier pour le pénitent qui se présente nu, après avoir mis sa propre chair en lambeau bien malgré lui et exposé son existence à la décomposition. Recraché par la mer, le marin "trépassé" n'attaque pas la bête avec les éléments complexes qui la constituent, mais s'adresse aux particules en conflit qui font d'elle cette impitoyable entité qui semblait "too big to fail". Cela peut sembler complexe et ingrat, mais c'est pourtant aussi simple et beau que la formule de Manolo que les enfants sages connaissent bien : devant la bête et les spectateurs avides d'images et de deadline, Manolo chante : "Si tu peux pardonner, si tu peux pardonner..."

Conscient qu'un parcours autodidacte ne jouerait pas en ma faveur si les vents avaient l'indulgence de me ramener au port, conscient que cette sortie de la caverne me serait reprochée par ceux qui en profitent autant que par les prisonniers dont la lumière artificielle assure le travail et les loisirs, c'est bel et bien l'amour et l'innocence, après m'avoir mis à l'épreuve, qui m'ont donné la force d'ouvrir le tombeau de Cassandre, d'accepter son épouvantable état et de ramener sa dépouille en la demeure.

Au final, ce qui m'avait mis en danger (le fait d'avoir osé redémontrer la roue) et ridiculisé sur le plancher des vaches était la pierre angulaire de tout mon travail, de toute mon odyssée. Nos ancêtres, auxquels nous devons les connaissances qui nous submergent de nos jours, n'ont pas attendu la technologie de pointe pour apprendre à découper le temps et les espaces, ni pour pratiquer leurs humanités et établir un code éthique propre aux constructions morales et matérielles. Tout comme eux, j'ai appris à me passer de l'école de la reconnaissance sociale, ainsi que des dieux et maîtres à produire qu'on y cultive, à me passer des grandes bibliothèques de la pensée et des obligations de résultats propres à la croissance empirique. Cette expérience socialement suicidaire m'a néanmoins prouvé ceci : même seul et enfermé dans une prison, l'être humain a la possibilité de réaliser le potentiel de son cœur intelligent ! S'il fait et assume ce choix sans condition, les chiffres, les signes et les symboles lui suffiront pour remonter la piste du temps et de l'espace, pour s'élever au-delà des prétentions des challengers qui se battent pour l'intendance de la tour de contrôle de la grande entreprise. Le langage de la vie s'exprime de lui-même et sa déconstruction s'offre à tous, sans condition de moyens ou de titre. Or cet effort de décomposition est probablement la seule clé qui permettra à l'Homme de recouvrer la maîtrise du verbe et de l'outil, dont la mauvaise conjugaison est à l'origine de notre échec consumériste. 

En précisant que les axiomes autour desquels s'articule mon ouvrage sont tous vérifiables dans la plupart des encyclopédies mises à notre disposition, j'espère que cette présentation suffira à justifier un CV sans la moindre relation avec l'univers du livre, ainsi qu'une absence totale de recommandation, de diplôme ou de bibliographie. 

En vous remerciant pour votre travail,

 

Cordialement,

Christophe Alexis Billard.

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