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  • christophealexisbi

Croissance du prix de l'action et décroissance de celui de la réflexion

Dernière mise à jour : 20 sept.


Cercle oculaire: image de l'Œil de Sauron.
AGIS ! - Illustration "Œil de Sauron" pour "Croissance du prix de l'action et décroissance de celui de la réflexion".

Agir, découvrir, façonner, remplir, exploiter, tel est le penchant de ce qui part de rien, sa propre naissance, et doit pour se mouvoir dans le temps et l'espace, défricher et déchiffrer le Tout qui l'entoure et le constitue.


Croissance du prix de l'action et décroissance de celui de la réflexion :

Le goût de l'effort (travail) résulte du besoin d'action, ne serait-ce que pour se nourrir ou ne pas se cancériser et se déformer dans l'immobilité en dépensant moins d'énergie qu'on en a métabolisée. S'il n'est pas un végétal, un être devant pour x raison demeurer immobile devrait faire l'effort de se priver en ne mangeant que ce qui pousse ou passe à sa portée, ce qui n'est pas dans la nature de l'Homme. Si vous enfermez un Homme ou un animal en prison et tenez à le garder en vie, vous devez le nourrir proportionnellement à son inactivité et il devra fournir lui-même quelques efforts quotidiens pour préserver sa santé. L'appréciation du repos, l'équilibre et l'immobilité représentent le penchant naturel inverse de cet appétit pour l'effort. Dans des conditions naturelles préservées, hors aliénation donc, les deux se régulent l'un l'autre. La paresse, qui est l'inverse du dynamisme, résulte d'un manque de régulation en faveur de l'effort, une dérégulation qui se traduit par l'accélération de l'entropie, par une croissance impériale et par une opulence collective.  La paresse survient lorsque l'Homme peut se la permettre et que son travail, ainsi que la définition donnée à ce terme, ne font plus sens. L'idée de grandeur, l'aliénation de masse, l'esprit de compétition (...) : la grande et illégitime victoire de l'action sur l'immobilité(!), qui va de pair avec  l'insatiabilité et les effets pervers que procure l'expérience mécanique du travail et de la récompense.

Ne pas agir, être patient, se retenir, réfléchir à deux fois (RE/FLECHIR : fléchir deux fois minimum), concernant l'humain en société, tout cela est impropre au terme "penchant", il s'agit de facultés qui s'acquièrent avec discipline en acceptant les enseignements de l'erreur et de l'échec. Pour l'animal, ou pour l'individu humain qui sait s'extirper de l'agitation du groupe, ces facultés sont précisément utiles pour donner ou redonner sens à l'effort ou pour économiser une précieuse énergie, c'est-à-dire fournir du travail sans que l'effort ne devienne une contrainte pour l'exploitant, autant que pour ce qu'il exploite.


Lorsqu'un système est verrouillé sur les obligations de résultat de ses moyens au détriment des besoins de l'ensemble, un système consumériste donc, la valeur de l'immobilité et de la réflexion est salutaire et bien plus précieuse que la persévérance dans la production de biens. Et cela, comme nous l'avons vu, parce que l'immobilité et la réflexion sont un travail comme un autre et que ce travail est le seul susceptible de redonner sens au mouvement, à l'action et à l'exploitation énergivore de la matière.


L'éthique, l'équilibre, l'équité, la gestion de la souffrance, le progrès maîtrisé, les limites et les responsabilités du libre-arbitre... Tout cela sont les travaux qu'ont délaissés le roi, le soldat et l'ouvrier, l'ingénieur et le religieux n'échappant pas aux règles exigées par la croissance et l'exercice du pouvoir. C'est donc l'affaire des penseurs au sens large, qui doivent mettre leur cervelle et leur sensibilité à l'épreuve, proportionnellement aux équations posées par une entité sociale consumériste qui ne dort jamais et aliène peu à peu les gouvernants et les gouvernés dans une même prison consumériste. Cette dernière, que les philosophes romains appelaient la grande Putain, les véritables taulards, la nomme à juste titre "la grande Prison". Un bocal hermétique sans parois palpables, où règne absence d'éthique, déséquilibre, inégalités flagrantes, souffrance, escalade du progrès... Et concernant le libre-arbitre : aliénation, abus de pouvoir et liberté arbitraire sous contrainte. Une liberté peu recommandable dont la détermination du monde nous fera payer le prix.  

   

Le penseur n'est pas un politicien, ni même un idéologue. Bien au contraire, sa charge, son travail, consiste à déconstruire toute architecture mentale, linguistique (ou maçonnique), et à les remettre en équation à l'échelle de l'Homme et à celle de l'univers déterminé qui l'entoure et le constitue. Plus la masse agite ses membres et ses cervelles, dissipant aux quatre vents sa puissance dégradée, corps rompus à l'action, plus le penseur doit demeurer immobile et concentrer son énergie en un seul point. Un travail de damné pourrait-on dire, disons de con (ensemble)/damné (maudit par), pour faire un clin d'œil au procès d'un Socrate, d'un Jésus ou d'un Nietzsche dont l'état de santé reflétait la santé de l'État d'un pays et d'un Occident malades. Persécutions, tortures, condamnation, reniement, indifférence, mise au chômage dans une société de bien (...), la maîtrise de la pensée n'est en rien une sinécure. Et l'effort que doit fournir la raison du penseur, n'est rien face à ce qu'endure la sensibilité de ce dernier. Une sensibilité qu'il ne convient pas de verrouiller, si le penseur ne veut pas sombrer dans l'écueil chirurgicale de la raison pure.


L'insensibilisation de l'individu est toujours proportionnelle à l'aliénation collective.

Lorsque vous êtes enfant par exemple, ou que vous vivez au sein d'une peuplade isolée en harmonie relative avec la nature, le meurtre de masse et la destruction des sols et forêts sont pour vous des choses irrationnelles, choquantes, violentes, traumatisantes... Vous pouvez vivre ainsi durant des millions d'années, mais il suffit de quelques générations d'aliénation sociale et d'expérience de l'Empire, pour que vous en arriviez à danser, boire et festoyer en toute tranquillité, tandis que les soldats mènent la guerre à votre place et que tous vos biens proviennent d'exploitations intensives illégitimes et innommables. Celle de sauvages fouettés jusqu'à l'os par exemple, ou celle d'une terre labourée au point d'en devenir stérile.  Les pères sévères n'apprécieront guère cette démonstration pourtant irréfutable. Leur orgueil ne souffre pas le jugement et rechigne à ce qu'on les accuse tous d'avoir à leur tour marché dans les pas de leurs pères sévères. Les "gentils papas humanistes" n'apprécieront pas non plus, fiers d'avoir arpenté les chemins de la justice et des droits de l'Homme, tout comme leur "papas". Ces pauvres diables, au final mus par le manque d'amour, omettent que l'Homme fort et juste est celui qui s'adapte et sait résister à l'air du temps, pas celui qui imagine s'adapter alors qu'il ne fait que se soumettre et perpétuer des paradigmes impropres à une évolution saine de notre espèce. Se soumettre non pas à la nature, ce qui serait un moindre mal pour l'ensemble, mais à l'autorité illégitime de l'Empire consumériste et aux intérêts particuliers par lesquels l'entité sociale (aussi aveugle qu'une IA) aliène l'esprit humain.

La sensibilité du penseur responsable est donc rudement mise à l'épreuve : si le peu de penseurs actifs dans une société décadente doit concentrer en quelques points (leurs cervelles), les raisons et les équations dissipées par le nombre, on peut facilement imaginer ce que concentre leur sensibilité au regard des indescriptibles horreurs contenues dans cette boîte noire "de Pandore" que personne ne semble plus vouloir ouvrir à leur place.

Pour résumer ces quelques paragraphes, lorsque l'action devient une mécanique aveugle et consumériste, l'immobilité et la réflexion du penseur représentent un travail intense, responsable, compassionnel, utilitaire, salutaire et impliquant de supporter une mauvaise réputation au village, de nombreux procès et de nombreux sacrifices. Sacrifices menant bien souvent à la maladie et à la mort, par exécution ou emprisonnement dans les fiefs du Hard power ou par simple abandon social dans ceux du Soft power.


Pourquoi cette démonstration sur la consumériste victoire du matérialisme sur la métaphysique et la pensée existentielle ? De la matière sur la pensée ? De la mécanisation sur l'humanisation ? De la cacophonie sur l'harmonie ? De l'action sur l'immobilité ? De la rhétorique sur la philosophie ? De l'aliénation sur la pensée ? Et pourquoi insister tant sur le travail harassant et sacrificiel du penseur qui enseigne en saignant ?

  

Parce que j'ai posé, reposé et posé encore ce problème dans mon entourage, comme le font nombre d'enfants, intellectuels ou artistes écorchés par le bel avenir du mal, tels des curés, dans leur propre paroisse. Et à en croire parents, frères et amis, philosopher n'est pas un travail.

"Trouve-toi un métier, c'est tout ce que réclament ta femme, tes enfants, ton chien, ta bagnole et ton portable dernière génération!"

 

"Contente-toi de soulager ta conscience sur le Net, il est là pour ça ! Mais n'y propose surtout pas ta pensée, pour faire le buzz c'est très contre indiqué ! Colle-y plutôt les derniers scandales et les réactions communes appropriées, ajoute des photos et expose ta chair ou celle que tu manges et tu décolleras dans les statistiques ! C'est prouvé. Tu économiseras donc du temps et tu pourras te consacrer à gagner de l'argent, à un vrai métier donc, qui te permettra de tuer le temps avec ta philosophie si bon te semble. Cela fonctionne à merveille. Le marketing informatique par exemple est un vrai métier ! Peu importe tes pensées, sache les référencer ! Sache aussi qu'une simple photo de ta femme l'épaule dénudée, ou de ta dernière bagnole, vaudra toujours un million de dollars de plus que tes vérités. Tiens, influenceur et diffuseur de contenus, ça aussi de nos jours c'est un bon plan pour booster une carrière."  Et n'oublie jamais, une seule image d'une jolie pomme bien fraîche, vaut tous les mots du monde !


A son époque, un certain Brel a couru chez les amis, chez le maire, chez le curé et je ne sais où encore, pour avouer son incapacité à plier le genou et à faire taire sa libre pensée... Tous lui ont souhaité bonne chance, tous ont témoigné d'une telle bonne conscience, que le pauvre diable a pu avoir la GARANTIE amère que chacun s'occuperait bien de sa femme après la fin ASSURÉE de sa quête.


Au village, le penseur a mauvaise réputation... Mais chut ! On ne chasse plus la vérité de nos jours, elle revenait trop vite et au galop, alors on coupe des arbres, cette Cassandre ne peut plus y faire son nid, et on n'a plus qu'à la laisser mourir.


Immoralité de cette histoire : la pensée, la métaphysique et ses métadonnées et tout ça et tout ça, ce n'est pas palpable, ça se vend très mal et c'est donc moins précieux que toute cette matière que l'on doit entretenir nuit et jour et qui fait ruisseler notre monnaie d'échange sonnante et trébuchante.

Immoralité certes, irrationalité aussi...


Ce qui est postérieur à la naissance de ce roitelet qu'est l'orgueil humain, c'est sa propre conscience, pas la conscience elle-même ! Et encore moins la logique, ou l'ordre dans le chaos. Les mathématiques, la sémantique (étude du sens qui s'établit dans tout système d'ensembles en interaction) ou la musicologie sont des noms donnés par l'Homme a des "matières" qui incluent données, coordonnées et métadonnées, pour nous aider à mieux comprendre l'univers qui nous compose et nous constitue. Sans l'abstraction mathématique et les métadonnées, par des progrès matériels pour observer la matière ! Mieux encore, la technologie nous permet de comprendre que le monde incarné demeure indissociable de ce qui ne l'est pas et que l'intelligence de l'Homme a bel et bien commis l'erreur de sous estimer la sensibilité et le génie déterminé de l'univers. Une preuve enfin !!! De ce que nos anciens affirmaient déjà il y a plus de deux mille ans, avec les simples moyens du bord et les métadonnées, ces fameuses pensées impalpables qui ne valent plus un clou.     

Dans toutes ces tribulations confusionnelles, la science elle-même est tombée malade !  Elle se cogne la tête dans le mur de Planck, elle voit disparaître des fonctions d'ondes qui chutent alors que c'est impossible, son cœur quantique et sa raison relativiste ne supportent plus de ne pas pouvoir partager le même lit... Et l'arme suprême, fierté des nations, n'est pas aussi dissuasive qu'on l'avait affirmé.


La tendance actuelle est à la solution eugéniste. Au programme, une régulation démographique par "la main invisible": la guerre, les mutations virales, la pollution, la guerre des sexes, la contraception, l'individualisme, la grève du ventre, la rétention du sperme vendu comme solution spirituelle et thérapeutique ultime, la compensation sociale et sensitive de la réalité augmentée, etc.

Soit, mais augmenter le nombre de morts et diminuer celui des naissances ne résoudra pas notre problème !


Eugénisme ou pas, il n'y a que nous, face à notre orgueil individuel et collectif, qui soyons en mesure de libérer Cassandre et d'avouer l'immense travail que fournissent les penseurs encore actifs pour faire contrepoids à notre aliénation. Rendons donc  aux penseurs ce qui leur appartient, remercions les pour être les seuls qui se sont battus pour tous nos droits autant que contre l'abus de ces droits et surtout, cessons par nos comportements d'indiquer aux enfants que la philosophie est un passeport pour la masturbation et le chômage.

 

J'espère que ce petit exercice de paradoxe vous aura été utile en ces temps difficiles, mais qu'il ne convient pas de tuer, comme nous le faisons entre deux journées d'exercice d'un " vrai métier". 

2meurons solid/aires.


CAB & HC Black's

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